A 50 kms à la ronde, des panneaux de signalisation indiquent la direction de ce petit village qui ne paie pas de mine, probablement méconnu de beaucoup, mais qui a cependant une renommée universelle auprès de dizaines de milliers de jeunes chrétiens du monde entier, en quête pour quelques heures, quelques jours ou quelques semaines, d'une retraite spirituelle au sein d'une communauté religieuse.
Il suffit de faire un tour sur le site web qui propose l'accès en 32 langues différentes pour être convaincu que ce que je raconte n'est pas une affabulation, car que vous soyez très croyant ou comme moi plutôt toujours dans l'expectative d'une bonne crise de foi, si vous êtes dans le coin, il faut absolument faire une boucle par Taizé, ne serait-ce que par pure curiosité.
En arrivant, impossible de ne pas penser à Maxime Le Forestier, San-Fransisco et sa maison bleue tant l'ambiance qui y règne évoque immanquablement les Seventies, l'esprit baba-cool, le Flower Power ou Woodstock, à la différence près qu'au lieu du Peace and Love ici c'est plutôt Peace and Lord, que l'on y prône, l'amour étant (théoriquement) nettement moins charnel et beaucoup plus spirituel que celui clamé en 1968.
Créée en 1940 par le Frère Roger ; la vocation de la communauté de Taizé a été dès l'origine de rassembler les jeunes de différents courants chrétiens autour d'axes de réflexions sur la foi, et la formule a sacrément bien marché puisque ce sont aujourd'hui des milliers jeunes des quatre coins du monde et des cinq continents qui s'y pressent chaque année avec même en point d'orgue la visite de Jean-Paul II himself en 1986.
Pour le décor, il faut imaginer un tout petit bled planté en haut d'une colline au milieu de nulle part, en rase campagne, avec de grands prés tout autour. Les pèlerins y arrivent surtout en auto-stop, attelés de gros sacs à dos, et dès leur arrivée, ils peuvent planter leurs tentes individuelles ou poser leurs sacs de couchage sous d'énormes tentures collectives.
La cuisine elle aussi est collective, on prend sa gamelle et ses couvert en plastique et on s'installe autour de grandes tablées, le soir c'est ambiance feu de bois, chants et guitares à la belle étoile ou prières une bougie à la main dans cette drôle et grande église moderne bizarre qui peut s'ouvrir pour recevoir une foule impressionnante.
Les frères qui ont succédé au frère Roger entretiennent aujourd'hui l'indépendance financière de Taizé en se suffisant à eux même au travers de l'artisanat, la vente de souvenirs et livres religieux. Rien de sectaire donc dans cet étrange village peuplé de nomades, même si l'on peut toutefois être surpris qu'une telle concentration d'apparente sage jeunesse, soit aussi fervente et passionnée de méditation.